Munitions dans le lac de Neuchâtel : le Laboratoire de Spiez participe aux analyses d’impact
En mars 2021, des échantillons d’eau et de sédiments ont été prélevés dans le lac de Neuchâtel dans la zone de tir des Forces aériennes de Forel, afin d’étudier l’impact à long terme des munitions tirées et non explosées. Le Laboratoire de Spiez, rattaché à l’Office fédéral de la protection de la population, est chargé d’analyser une partie des échantillons.
Fin mars, à Forel dans le canton de Fribourg, des plongeurs d’armasuisse et du commandement de déminage et d’élimination de munitions non explosées de l’armée ont prélevé à différents endroits à proximité de la rive des échantillons de sédiments au fond du lac de Neuchâtel. Ce qui distingue cette zone du reste du lac, c’est le fait que les Forces aériennes suisses s’y entraînent à des tirs air-sol depuis près d’un siècle. Entre 4500 et 5000 tonnes de résidus de munitions s’y sont en conséquence accumulées. Le Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) a procédé à des analyses d’eau et de sédiments dans cette zone située à proximité de la réserve naturelle de la Grande Cariçaie.
Il ne s’agit pas des premières analyses réalisées à Forel
Si, aujourd’hui, seules des munitions d’exercice dépourvues d’explosifs sont tirées, les Forces aériennes suisses se sont également entraînées à Forel avec des munitions réelles pendant la Seconde Guerre mondiale, raison pour laquelle des ratés sont encore présents dans le lac. La campagne d’analyse lancée à Forel vise à évaluer l’impact de ceux-ci sur la qualité de l’eau et est réalisée selon un plan d’analyse des eaux et des sédiments développé par armasuisse Sciences et technologies, en collaboration avec le Laboratoire de Spiez.
Le DDPS avait déjà analysé les eaux dans la zone de tir de Forel en 2015. Il en était ressorti que les concentrations en cuivre et en zinc avaient augmenté dans l’eau du lac du fait des activités de tir. Mais ces différences ont également été constatées sur les sites de référence et les valeurs mesurées pour les métaux lourds étaient inférieures aux limites prescrites par l’ordonnance sur la protection des eaux et l’ordonnance sur les substances étrangères et les composants.
Six ans après, le DDPS a souhaité à nouveau contrôler la qualité de l’eau. Onze échantillons d’eau et douze échantillons de sédiments ont été prélevés dans les zones de tir actuel et des anciennes cibles utilisées entre 1928 et 1929. Des échantillonnages ont également été réalisés en aval et en amont de la zone afin d’avoir un point de comparaison. La prise d’échantillons d’eau a été effectuée à environ 30 cm au-dessus du fond tandis que les sédiments ont été prélevés dans le fond à 30 à 50 cm de profondeur. Le DDPS publiera un rapport détaillé des résultats durant l’été. Ces analyses sont une première étape qui doit permettre d’évaluer la nécessité de prendre des mesures supplémentaires. La suite à donner sera discutée avec l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), les cantons de Fribourg, Vaud et Neuchâtel et les associations environnementales Pro Natura et de la Grande Cariçaie.
Expertise en matière d’anciennes munitions dans les lacs suisses
Les échantillons seront analysés par le Laboratoire de Spiez pour les métaux lourds et par le laboratoire Bachema pour les explosifs. L’étude menée n’est pas une première pour le Laboratoire de Spiez, qui a déjà analysé à plusieurs reprises l’eau des lacs afin d’évaluer la pollution liée à des résidus d’explosifs. Alors que les munitions de Forel ont été tirées par les Forces aériennes suisses lors d’exercices, des milliers de tonnes de munitions inutilisées ont été déversées dans les lacs d’Uri et de Thoune après la Seconde Guerre mondiale, la plupart reposant encore aujourd’hui au fond.
Les analyses réalisées par le groupe Analytique de l’environnement du Laboratoire de Spiez en 2006 et 2007 avaient déjà confirmé que les munitions déversées ne présentaient aucun risque de pollution pour les eaux du lac. À l’époque, les substances TNT, dinitrobenzène, mercure et plomb, présentant un danger significatif, n’ont pas pu être détectées dans le lac de Thoune. Par ailleurs, le scénario de rejet de substances le plus défavorable (worst case) a montré que les valeurs limites de l’ordonnance sur les sites contaminés ne seraient pas non plus atteintes à l’avenir. Depuis lors, les experts recommandent généralement de ne pas récupérer ces vieilles munitions, car selon les conclusions, elles ne présentent pas de risque écologique. Néanmoins, l’eau des lacs à proximité des sites concernés a depuis été recontrôlée à plusieurs reprises par mesure de précaution.